26 novembre 2015

Mississippi d'Hillary Jordan

Titre original : Mudbound

Résumé :
Dans les années 40, Henry arrache sa femme et ses enfants à une vie douillette à Memphis pour venir s'enterrer dans une ferme du Mississippi. Commence alors pour eux, une vie de labeur marquée par la boue qui englue tout dans une contrée où le racisme est encore très présent dans ce Sud des États-Unis comme va le constater Ronsel, le fils d'une famille noire, revenu de la guerre en Allemagne...

Mon avis :
Je ne sais plus par quelle copinaute j'ai eu vent de ce livre mais je m'étais dit en voyant sa chronique que ça me ferait un bon "J" pour mon challenge ABC. C'est donc cette année que je l'ai mis dans ma liste et le dernier livre que j'ai lu pour ce challenge et il a été tout à fait conforme à ce que j'en attendais, une histoire âpre et dramatique, même si assez classique du genre, et que j'ai beaucoup aimée.

Laura est déjà vieille fille lorsqu'elle rencontre Henry McAllan et l'épouse.  Plusieurs années après leur mariage et deux enfants plus tard, alors que la seconde guerre mondiale va se terminer, il se met en tête d'acquérir une ferme pour reprendre une tradition familiale. Contre son gré, il entraîne sa femme dans son  "rêve" et la petite famille se retrouve perdue dans la boue du Delta du Mississippi dans un endroit insalubre en compagnie du père de Henry, un être irascible et raciste. Les retours de Jamie, le frère d'Henry, un être charmeur mais hanté par la guerre et bientôt de Ronsel, le fils aîné d'une famille noire travaillant sur la ferme, et qui s'est sorti de sa condition par sa bravoure en Allemagne, vont exacerber les tensions et les passions au sein de la famille et dans la communauté avoisinante encore marquée par le racisme dans ce Sud profond où sont encore très enracinées les traditions du Ku Klux Klan...

J'ai dit en préambule que c'était une histoire classique et c'est vrai. Quoi de plus cliché que le Sud des États-Unis dans les années 40 (ou 30 pour d'autres livres), marqué par la pauvreté ou plutôt les vicissitudes d'une vie à tenter de sortir quelque chose de la terre, et le racisme et l'idée de certaines gens que si l'abolition de l'esclavage a été aboli, c'est juste une affaire de gens du Nord et ne les concerne pas parce que que les noirs n'ont qu'à rester à leur place... Et pourtant malgré son classicisme, Hillary Jordan arrive à nous intéresser à son histoire, au parcours et aux épreuves de ses personnages.

Il y a donc, à travers les McAllan et les Jackson, deux histoires en une. Deux histoires marquées par la haine, les difficultés, les non-dits, les déceptions et la descente aux enfers de certains. C'est un roman qui porte bien son nom (en VO tout du moins), car il est "boueux". En le lisant, on se sent englué dans une espèce de boue comme celle qui jonche la propriété des McAllan après les pluies et les tempêtes, on se sent parfois oppressé, on plaint la plupart des personnages et on frémit devant ce qu'il arrive à certains.

Ce roman est le premier d'Hillary Jordan et pour un coup d'essai, elle s'en sort très bien. Son roman est écrit du point de vue de 6 personnages : Laura, Henry, Ronsel, Jamie, Florence et Hap (les parents de Ronsel), avec un chapitre/un narrateur et à la première personne du singulier. Ce que j'ai aimé c'est le style qu'elle adapte suivant le narrateur, ce qui permet de bien dégager les personnalités et de reconnaître qui est qui. J'ai lu des romans à plusieurs narrations où l'on ne savait pas qui s'exprimait.

J'ai beaucoup aimé le personnage de Ronsel, le fils de la famille noire car c'est le personnage qui symbolise le mieux les contradictions de cette région encore sous l'emprise de la haine raciale. Élevé dans cette famille noire et dans l'idée que son peuple doit rester "à sa place", la guerre va lui faire découvrir un autre monde, un monde où les noirs peuvent se distinguer, recevoir les honneurs et non pas s'effacer devant le blanc. Où ils peuvent coucher avec une blanche (une Allemande dans ce contexte) sans être lynchés. Alors évidemment, le retour au pays va être brutal quand, fort de ses convictions, il va vite se heurter au racisme des petits blancs. Ce qu'il subit m'a fendue le coeur mais j'ai beaucoup aimé les dernières lignes le concernant (et qui sont les dernières lignes du roman) porteuses d'espoir.

Laura est un personnage qui s'affirme au fil du roman. On peut penser qu'elle manque de caractère et c'est une peu vrai mais il ne faut pas oublier que si le Mississippi, et le Sud des États-Unis en général, est un monde de blancs, c'est aussi un monde d'hommes où les femmes sont, elles-aussi, juste bonnes à rester à leur place. Je l'ai donc trouvée assez courageuse.

Jamie est, lui, un personnage assez touchant. Il avait tout pour lui, le charme, le bagout mais la guerre a fait de lui un homme changé, voire brisé. C'est un peu le pendant de Ronsel et d'ailleurs c'est ce qui va les rapprocher, leurs épreuves à la guerre ayant brisé les préjugés raciaux.

Henry ne m'a pas vraiment plu, enfin disons qu'il n'est pas méchant mais c'est l'homme de la maison qui ne se pose pas beaucoup de questions, qui prend les décisions de façon unilatérale. Heureusement, les épreuves vont le changer un peu.

J'ai beaucoup aimé Florence et Hap les parents de Ronsel, très touchants et pas du tout le papy, le père d'Henry et Jamie, un homme odieux.

En conclusion, même si ce premier roman est assez classique dans son histoire de haine raciale et de luttes contre les éléments pour faire vivre un petit bout de terre, dans les événements qu'il décrit, et les passions que certaines situations exacerbent, je l'ai trouvé très intéressant et prenant et pendant 350 pages, je me suis vraiment crue transportée dans cette boue du Mississippi avec Ronsel, Laura et Jamie. Et si vous aussi, vous voulez être émue et révoltée par ce que la haine peut engendrer, lisez-le.

Note :



Il fait partie du Challenge ABC 2015 de Nanet
  26/26
Challenge terminé !

2 commentaires:

  1. Assez classique, je suis d'accord. Rien de nouveau sous le soleil et pourtant pour un premier roman je m'incline ! Il est très prenant !

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  2. Oui tout à fait. Et j'ai vu qu'elle avait sorti un autre roman qui n'a pas l'air mal, sorti en 2011 mais qui semble dans la mouvance de La servante écarlate, donc pas très drôle. Merci beaucoup pour ton commentaire, Nelfe.

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