18 février 2018

En attendant Bojangles d'Olivier Bourdeaut

Résumé :
Ils s'aiment éperdument et leur vie est un éternel tourbillon dans lequel ils évoluent sur la version de Nina Simone de Mr Bojangles, avec leur petit garçon et un drôle d'oiseau nommé Mademoiselle Superfétatoire. Mais un jour, la réalité et la maladie s'invitent dans la danse...





Mon avis :
Voilà un livre qui a fait le buzz ces derniers mois et qui a suscité de nombreuses louanges, été adapté en bande-dessinée et même en pièce de théâtre. J'avais entendu parler de ce roman par une amie il y a un an je crois et elle me l'avait tellement bien "vendu" que j'ai décidé de me l'acheter et de le mettre dans ma liste du Challenge ABC de cette année. Après ma longue lecture du Livre des Radieux de Sanderson, j'ai décidé d'opter pour cette lecture courte en pensant adorer et avoir une parenthèse enchantée. À la place, si ma lecture a été bonne, j'en suis ressortie complètement déprimée...

On n'arrive pas tous devant une lecture avec le même vécu (merci Frankie pour cette lapalissade !). Les joies, les peines, les maladies, les deuils nous façonnent de façon différente et un livre ne résonnera pas pareil chez l'un ou chez l'autre. Pourtant la majorité des avis est unanime, En attendant Bojangles est une pépite, un petit bijou, une histoire loufoque qui emporte, un coup de coeur chez beaucoup, et j'en passe. Du coup, je me demande comment j'ai pu passer à côté de tout ça...

Le début est super. Franchement. J'ai cru être dans Amélie Poulain avec cette atmosphère colorée et un brin désuète. Puis au fur et à mesure de mon avancée, j'ai trouvé cela moins enthousiasmant et la réalité a fini par me tomber dessus... J'aime pourtant beaucoup les histoires qui sous couvert de thèmes dramatiques le font avec humour voire loufoquerie. En cela, La vie est belle de Roberto Benigni est un modèle et effectivement un bijou. Les livres de Mathias Malzieu qui évoquent le deuil, le handicap, la la maladie avec beaucoup de poésie et en dédramatisant les thèmes sont autant de merveilles. Olivier Bourdeaut le fait donc aussi et pourtant la mayonnaise n'a pas pris. Ou plutôt si, elle a pris mais elle a tourné. Est-ce parce que l'histoire est trop tragique pour être camouflée sous les airs de fête, les cocktails et les cotillons ? Est-ce que c'est parce que c'est trop dramatique pour qu'on en parle de façon loufoque ? Est-ce la façon dont l'auteur raconte ? Est-ce que le sujet est trop personnel pour moi pour voir au-delà d'une réalité tragique et terriblement triste ?

Je disais plus haut qu'on arrive devant une lecture avec son vécu. J'ai perdu ma mère et j'ai lu le roman de Mathias Malzieu, Maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi, quelques semaines après et j'ai adoré car cela m'a fait du bien car il mettait des mots sur sa douleur et la mienne, avec beaucoup de pudeur mais aussi de générosité et une vraie poésie. J'ai eu un oncle bipolaire (on disait maniaco-dépressif à l'époque) alcoolique qui s'est suicidé. Cela fait plus de vingt ans. Mais la lecture d'En attendant Bojangles qui traite de ces sujets ne m'a pas fait du bien. Au contraire, cela m'a rappelé les phases maniaques de mon oncle qui saisissaient la gamine que j'étais dans les années 70, et ses passages en hôpital psy quand il était en phase de dépression. Et ce roman m'a remis en mémoire que, non, être bipolaire ce n'est pas la fête perpétuelle où l'on sirote mondainement de l'alcool en dansant sur une chanson nostalgique et qu'entrer dans le jeu du malade ce n'est pas l'aider ou faire preuve d'un amour fou. Et non plus faire penser à un petit garçon qu'on peut manquer l'école et s'amuser sans arrêt et sans conséquence.

Après, c'est sûr qu'il y a beaucoup d'amour dans ce roman, je ne vais pas jeter la pierre au mari/père de mettre tout en oeuvre pour faciliter la vie de ses proches. En fait, j'aurais aimé que le personnage de la mère soit juste une fofolle excentrique pour qui la vie était une vaste farce. Pas que la maladie et le reste s'en mêle. Le roman aurait peut-être eu moins d'impact sur certains mais pour moi ça aurait été beaucoup moins déprimant. Car en fait, c'est la fin qui m'a plus révoltée et déprimée. Je ne veux pas spoiler mais ce n'est pas amusant du tout du tout.

Je l'ai dit, au début la mère est une amusante fofolle qui n'en fait qu'à sa tête, qui oublie les choses du quotidien et pour qui la vie est une fête ou une source d'étonnement perpétuel. J'ai des copines qui sont un peu comme ça, donnant l'impression de vivre sur une autre planète :) Et je l'ai trouvée vraiment très sympathique. Après ça c'est gâté. Pas à cause de ses troubles psychologiques, la pauvre, elle n'y peut rien, mais je n'ai pas apprécié qu'on la conforte dans ce rôle. Et je me suis demandé comment elle avait pu avoir et élever un petit garçon comme celui du roman, qui a plutôt la tête sur les épaules et n'a pas l'air d'avoir souffert d'avoir été élevé à la va comme j'te pousse :D Son éducation excentrique en fait un garçon certainement plus ouvert et cultivé que la plupart des enfants de son âge mais je rappelle que la réalité ce n'est malheureusement pas ça. Le petit garçon en parle d'ailleurs quand il raconte son passage à l'école...

Le mari c'est un peu comme le père de La vie est belle, sauf que la mère n'est pas une enfant à qui on peut faire croire que la réalité autour de soi est un jeu pour faire passer la terrible réalité. Je vous ai dit que même si je comprenais ce qu'il faisait par amour, je ne le cautionnais pas. Et j'ai eu du mal aussi avec la fin...

Il y a deux personnages que j'ai beaucoup aimé, la grue Mademoiselle Superfétatoire, l'animal de compagnie qu'on voudrait tous avoir et le sénateur, l'ami de la famille, qui s'amuse beaucoup avec eux.

Le style de l'auteur est agréable à lire, il est touchant et naïf, comme si c'était vraiment un petit garçon qui racontait l'histoire de sa famille. Certains chapitres, eux, sont narrés par le père et sont effectivement moins "enfantin". C'est difficile de savoir à quelle période se déroule le roman. Ça parle de la chute du mur de Berlin (1989) et de l'obligation du contrôle technique (1992) donc cela se passe au moins une dizaine d'années après ces faits mais on a l'impression d'être dans les années 50 avec cette atmosphère gentiment surannée qui caractérise le roman.

En conclusion, ma chronique donne l'impression de ne pas avoir aimé le roman alors que ce n'est pas le cas. Je ne l'ai pas adoré comme beaucoup mais une partie de ma lecture a été plutôt plaisante tant qu'on reste dans la fête et les tourbillons, la gentille excentricité de madame qui se fait appeler tous les jours par un prénom différent et sa propension à voir tout avec amusement, sous l'oeil amoureux et bienveillant de son époux et l'amour de son enfant. C'est quand le drame s'en est mêlé que j'ai trouvé l'histoire moins convaincante et surtout elle m'a énormément déprimée par sa conclusion. Et franchement, je n'ai pas envie d'être déprimée en ce moment. Mais au moins, ce roman m'aura fait découvrir Mr Bojangles que j'ai écouté avant de lire le livre pour savoir de quoi il était question. J'ai donc écouté la version de Nina Simone, bien sûr, qui est celle dont on parle dans le livre mais aussi celle de Sammy Davis Jr (ma préférée), Whitney Houston ou encore Robbie Williams. Et si vous aussi voulez découvrir la chanson et bien sûr ce roman que la majorité des lecteurs a adoré, allez-y ! :) Quant à moi, j'aimerais bien lire la bande-dessinée et voir la pièce de théâtre qui sont adaptés du roman.

Note :



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Le roman fait partie du Challenge ABC 2018 de Nanet
  3/26

5 commentaires:

  1. Eh bien tu vois, nous sommes au moins deux ! Avec moi non plus, la mayonnaise n'a pas pris, alors que comme toi, j'ai apprécié le début. Ce ne sont sans doute pas pour les mêmes raisons que nous n'avons pas aimé toi et moi, mais les personnages ne m'ont pas touchée, j'ai trouvé qu'ils en faisaient trop et cela a glissé sur moi sans m'atteindre. Tant pis ! J'ai lu d'autres livres sur la folie qui m'ont bien plus secouée, mais celui-là, clairement, non.

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  2. Il me tente quand même. J'aurais au moins des attentes moins grandes, sachant que ce n'est pas unanime!

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  3. Ton avis me refroidit beaucoup parce que non seulement je voulais le lire mais aussi parce que ma belle-soeur est bipolaire, qui ne se soigne pas correctement... et je ne suis pas sûre d'adhérer à ce roman selon comment la maladie est présentée. Si c'est trop loufoque, je sais que je l'accepterai pas. Alors, je vais peut-être passer mon chemin sur ce roman qui me tentait pourtant beaucoup.

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  4. @Biblioblogueuse, cela me fait plaisir de voir un autre avis nuancé ! :)C'est vrai que les personnages sont très exaltés, presque caricaturaux même.

    @Karine, oui je pense qu'il faut le lire pour se faire son propre avis.

    @Belledenuit, c'est sûr que quand on est touché de près par cette maladie, c'est dur de lire ce roman. Je suis désolée pour ta belle-soeur, ce n'est pas facile à vivre pour l'entourage quand la personne ne se soigne pas bien...

    Merci pour vos commentaires.

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  5. J ai découvert le sujet du film dans la salle. C est bien ainsi car ma famille est touchée par cette maladie mentale. Je n y serais pas allée. Mais je n ai pas de regrets. Les symptômes arrivent crescendo. Mêler un enfant à ces situations douloureuses inexplicables rarement drôles est encore plus insoutenable pour le spectateur. Il faut un amour homme femme inconditionnel pour rester, lui est cependant très borderline sans passer de l autre côté. N allez pas nu dans la rue vous serez vite enfermé. Plus le diagnostic est fait tôt mieux c est. C est un film. Je ne retiendrai que la beauté de leur amour et le jeu remarquable des acteurs.

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