17 février 2010

Dracula de Bram Stoker

Quatrième de couverture :
Jonathan Harker, jeune clerc de notaire, est envoyé en Transylvanie pour rencontrer un client, le comte Dracula, nouveau propriétaire d'un domaine à Londres. À son arrivée, il découvre un pays mystérieux et menaçant, dont les habitants se signent au nom de Dracula. Malgré la bienveillance de son hôte, le jeune clerc ne peut qu'éprouver une angoisse grandissante. Très vite, il se rend à la terrifiante évidence : il est prisonnier d'un homme qui n'est pas un homme. Et qui partira bientôt hanter les nuits de Londres...

Mon avis :
 Ce roman est la lecture commune choisie pour le Book Club de février.
J'avais déjà lu ce roman il y a longtemps, lors de la sortie du film de Francis Ford Coppola avec Gary Oldman. De ce roman, je ne me souvenais que de Dracula, de son château dans les Carpates, de Mina Harker et du fait que j'avais beaucoup aimé alors.
Sa relecture fut donc comme une page blanche avec une question : Allais-je me me laisser encore envoûter par ce roman écrit à la fin du XIXe siècle?
La réponse est oui mais avec quelques petites réserves... C'est vraiment une belle histoire, très dense mais avec quelques longueurs et un peu de misogynie qui m'a un peu agacée, même si c'est l'époque victorienne qui voulait ça.

Bram Stoker a donc écrit ce roman en 1897. Même si les vampires étaient connus dans la littérature auparavant, c'est lui qui a jeté les bases du mythe vampirique tel que nous le connaissons maintenant : il dort dans un cercueil, ne supporte pas l'ail et les objets représentatifs de la religion chrétienne : le crucifix, l'eau bénite et les hosties. Il ne peut pénétrer chez quelqu'un s'il n'a pas été invité et on le tue en plantant un pieu dans son coeur et en lui coupant la tête. Il n'a pas d'ombre et de reflet dans un miroir. En revanche, contrairement à la croyance générale, il peut se déplacer de jour et ne brûlera pas au soleil. Il n'a juste pas ses pouvoirs durant la journée. Car notre Dracula peut se transformer en loup, en chauve-souris et en brouillard et hypnotise ses victimes.

Contrairement à la mode actuelle qui montre des jeunes vampires séduisants, voulant se fondre dans la masse des humains et ayant des relations amoureuses consenties avec des humaines, (jeunes et lycéennes de préférence !), notre Dracula est un monstre, pas glamour pour un sou, un vieux machin arachnéen (enfin, je me l'imagine comme ça) ! Il se rapproche plus du Nosferatu de Murnau que d'Edward Cullen, Angel ou Bill Compton ! Il peut rajeunir en buvant du sang mais même avec ça, à la façon dont il est décrit dans le livre, je n'ai pas l'impression qu'il se rapproche d'un chouya de Gary Oldman qui l'interprétait dans le Coppola !

Concernant l'histoire elle-même, elle se découpe en quatre parties et sous forme de journaux intimes des différents protagonistes, d'articles, de lettres ou de rapports. On passe de l'un aux autres et on a ainsi une vision d'ensemble et non pas le point de vue d'un seul narrateur. C'est très agréable à lire et donne une dynamique au récit.

La première partie concerne Jonathan Harker, un jeune clerc de notaire qui est envoyé dans les Carpates pour finaliser l'achat d'une propriété en Angleterre par le comte Dracula. Dès le début, l'ambiance est oppressante et, comme Jonathan, on s'aperçoit que le Comte Dracula est un être bien mystérieux et un peu terrifiant...
Cette partie est une bonne introduction au livre, on se demande vraiment ce qu'il se passe, (on fait comme si on ne connaissait ni Dracula ni l'histoire ! ;)), les scènes sont bien décrites et on est glacé d'effroi comme Jonathan. J'imagine bien ce pauvre garçon dans ce château délabré entouré de créatures démoniaques...
Comment il arrivera à s'en sortir par la suite reste apparemment un mystère.

La deuxième partie concerne majoritairement Lucie Westenra, une jolie jeune fille qui a pour amie Mina, la fiancée de Jonathan. Lucy va se marier, après avoir éconduit deux prétendants, tous amis. Des événements bizarres, mystérieux et angoissants surviennent dans la ville où elle séjourne et bientôt, on assiste à sa déchéance physique comme si elle était atteinte de maladie de langueur...  Pendant que Mina est partie récupérer son cher Jonathan en Roumanie, le docteur Seward (un des ses prétendants) en appelle à l'un des ses anciens professeurs hollandais, le professeur Van Helsing, qui voit bientôt de quoi il retourne... Malheureusement, Lucy ne sera pas sauvée...
Cette partie n'est pas ma préférée, surtout quand ça concerne simplement le Dr Seward..J'ai trouvé qu'il y avait des longueurs, c'était un peu lent et je n'ai pas du tout aimé les scènes avec Reinfield, le déséquilibré mental dont s'occupe John Seward. Même s'il a un quelconque lien avec Dracula, je n'ai pas vu l'intérêt du personnage !

La troisième partie se concentre sur la façon de se débarrasser de Dracula sur le sol anglais. Tous les protagonistes de l'histoire sont réunis, Jonathan et Mina, le professeur Van Helsing, Le Dr. Seward, Arthur Holmwood, le fiancé de Lucy et Quincey Morris, le troisième prétendant.
Partie vraiment captivante et palpitante ! On a l'impression que Dracula a toujours une longueur d'avance sur eux et que leur quête est vouée à l'échec !

La quatrième partie voient nos héros à la poursuite de Dracula jusque dans son fief des Carpates ! C'est vraiment une course contre la montre, surtout en ce qui concerne la santé de Mina. Sa guérison passe par la destruction de Dracula et le comte a plus d'un tour dans son sac pour leur échapper !
Dans cette partie, comme dans le reste du roman, on a vraiment l'impression de vivre les événements !

Concernant les personnages, je ne vais pas m'attarder sur les hommes qui sont représentatifs de l'époque, des gentlemen qui sont là confrontés à des événements surnaturels et dramatiques.

 Le Professeur Van Helsing est lui plus consistant puisque c'est lui qui connait la vérité sur Dracula (comment, on ne sait pas) et est un peu le rassembleur, celui vers lequel les autres se tournent pour savoir quoi faire.

C'est la façon dont est traité le personnage de Mina qui me met un peu en colère. Je sais bien que la fin du XIXe n'est pas notre XXIe actuel mais j'ai été fâchée à plusieurs reprises. Apparemment, Mina est une jeune fille libérée pour son époque, puisqu'elle est institutrice, qu'elle a des idées modernes, du caractère et qu'elle se déplace sans chaperon. Elle va chez son amie Lucy toute seule et va rejoindre Jonathan en Roumanie, là encore sans chaperon ! D'ailleurs aucune mention d'une quelconque famille ! C'est quand elle devient l'épouse de Jonathan que ça se complique ! Elle devient alors, aux yeux des ses compagnons, une femme pure et délicate qu'il faut ménager ! Elle aide les garçons dans leur quête de Dracula, a de très bonnes idées mais dès lors qu'il s'agit d'aller à la poursuite du vampire, allez hop, bobonne à la maison ! Van Helsing le dit d'ailleurs noir sur blanc ! Elle a le cerveau d'un homme supérieurement intelligent mais le coeur d'une femme et les événements pourraient provoquer un dérèglement nerveux, insomnies et cauchemars ! Ben voyons ! Le premier soir où ils vont visiter la maison du comte, elle est envoyée au lit comme une enfant. Ce qui lui sera fatal d'ailleurs !
Puis ensuite, Jonathan envisage de la renvoyer dans leur maison qui, avec ses tâches domestiques vaudra mieux pour elle ! Non mais je rêve !
Une fois mordue par le comte et quand l'hostie lui brûle le front alors là c'est le bouquet ! On dirait presque une femme adultère frappée par le sceau de l'infamie ! Même elle se voit impure...

Quant à Dracula, c'est un peu l'arlésienne du livre ! C'est le personnage central mais on le voit très peu finalement ! Dans la première partie surtout, dans son château, puis de temps en temps au cours du roman et finalement à la fin. Mais, évidemment, le personnage est assez fort pour qu'il imprègne tout le livre de sa présence maléfique ! Difficile pour moi de me faire une opinion sur le personnage. C'est à mes yeux un monstre assoiffé de sang qui ne mérite aucune pitié. Il est lui-même sans états d'âme et n'hésite pas, par deux fois, à s'attaquer à des jeunes femmes pour vouloir en faire ses semblables. D'un autre côté il est prisonnier de sa condition, condamné à boire le sang de ses victimes pour survivre. C'est sa malédiction et seule la mort peut l'en délivrer.

Quant au style du livre, il est très vivant ! C'est, bien sûr, très bien écrit, un peu emphatique par moment avec leur "Ô" à tout bout de champ mais les détails sont très vifs, on a vraiment l'impression d'être au coeur des événements et de les vivre vraiment ! La scène où ils découvrent Dracula en train de se nourrir sur Mina est particulièrement frappante. De même que l'emploi du mot "cramoisies" pour décrire les lèvres du comte en donne une image bien précise qu'on n'a pas de mal à se représenter !
La seule chose qui m'a un peu gênée c'est quand le traducteur dit, quand on fait connaissance avec Van Helsing, que ce dernier parle un anglais plein d'erreurs, redondant et truffés d'allusions bibliques et qu'il n'a pas cru bon d'en rendre les particularités... Aurait-il, dans ce cas, dénaturé sciemment l'oeuvre de Stoker ? Car si l'auteur a jugé bon de faire parler ainsi Van Helsing, c'est qu'il y a bien une raison ! Dans ce cas, de quel droit le traducteur se permet-il de faire une adaptation ? J'aimerais savoir comment c'est traduit dans la version française faite par Lucienne Molitor. Ça m'a assez perturbée tout au long du roman quand je lisais les paroles de Van Helsing. Ça n'a pas remis en cause le plaisir que j'ai eu à lire ce livre mais je garde quand même le sentiment de m'être fait berner à un moment.

En conclusion, malgré quelques longueurs et lenteurs, ce Dracula reste un grand classique du genre, à lire absolument pour avoir une vision gothique et sans fard du mythe qu'on nous décline maintenant à toutes les sauces.

Note :


12 commentaires:

  1. quel magnifique article :) j'ai adoré ce livre, je l'ai lu quand j'étais en terminale et j'en garde toujours un excellent souvenir, ainsi que du film de F.F.Copola !

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  2. Je l'ai pour ma part étudié en dernière année de littérature anglaise, et donc lu "dans le texte", ce que je conseille vivement : comme tu le dis, le traducteur s'est permis beaucoup de libertés vis-à-vis de l'anglais "approximatif" de VH, et... bah je sais pas, je l'ai lu en français pendant le même semestre et ça m'a moins marquée.
    Quant au côté misogyne de la chose, ben je pense que c'est voulu par Stoker : quand Mina est envoyée au lit et se fait mordre, je vois plus ça comme une poussée de féminisme, pour ma part ! Après tout, la misogynie de ses collègues l'a conduite à la morsure. J'avais d'ailleurs tout une analyse du féminisme dans Dracula très intéressante... mais je ne sais plus où !

    Par contre, l'adaptation de Coppola manque de fidélité, clairement.

    J'ai beaucoup aimé étudier Dracula, en tout cas, c'est une autre vision de l'oeuvre. Jolie analyse, Frankie ;-)

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  3. Merci Ash ! Pour la traduction, il y a eu aussi Lucienne Molitor qui a traduit le livre. Elle a peut-être été plus fidèle !

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  4. Très bon article, on se rejoint dans nos impressions !

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  5. Bon c'est la loose, je n'ai toujours pas lu ce classique ! ^^
    J'ai toujours apprécié les films que j'ai pu voir, notamment celui avec Gary Oldman (que j'adore) mais il faut vraiment que je m'attelle à l'oeuvre originale. Ton billet me le confirme.

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  6. J'aime beaucoup ton blog, je le rajoute dans mes favoris !! Bravo pour le design, les billets etc c'est une grande réussite !
    A bientot et bonne journée !!

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  7. Pour ma part, j'ai beaucoup aimé lire Dracula ! J'ai réussi à passer sur le côté un peu macho du bouquin, tout de même Mina est présentée comme intelligente, ce qui veut donc dire que c'est possible pour une femme mdr...
    Au passage, je ne sais plus si je te l'ai déjà dit, joli blog !

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  8. Merci Flof ! Pour ce qui est de l'intelligence de Mina, je n'aime la façon dont les personnages en parle, comme si c'était une faveur de la reconnaître intelligente !

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  9. Ah Dracula... sans conteste l'un de mes livres préférés !
    Je suis d'accord avec toi sur le fait que finalement Dracula n'est pas si présent que ça. En revanche je n'ai pas du tout la même image du personnage que toi : je le vois plutôt comme un personnage très séduisant, le genre de bad boy du 19è siecle dont les filles raffolent... ^^

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  10. Pourtant dans le livre, il le décrit bien comme quelqu'un de pas beau aux lèvres très rouges et, quand il a bu du sang, il est plus présentable mais je n'ai pas l'impression non plus que c'est un Apollon !

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